On pourrait peut-être aussi arrêter d’essayer de réduire et de ridiculiser tout un mouvement et des points de vue liés aux expériences de victimes en les caractérisant de « wokes »? Ou arrêter d’insister sur le fait que ça peut arriver que « la fille ne soit pas clean-clean et irréprochable elle non plus » quand c’est elle la victime? Ou d’essayer de minimiser ce que le gars a fait en rappelant qu’il n’a tué ni violé personne, et que bien d’autres l’ont fait avant lui sans se faire prendre?
Les temps changent, ce qui était acceptable il y a 10-20-30 ans ne l’est plus aujourd’hui, et les victimes commencent à peine à pouvoir reprendre le contrôle sur leur propre récit et à mettre au jour leur réalité. Ce serait peut-être bien si on les écoutait au lieu de parler à leur place et d’analyser les choses selon notre perspective et jugement, alors que notre perspective, justement, n’a à peu près aucune importance et est fort différente de celle des personnes concernées.
Ce qui ne représente qu’une « erreur de jeunesse » pour un peut être un évènement fortement traumatisant pour l’autre : ce serait le fun qu’on ne le minimise pas. Je lis ce sujet depuis le début sans intervenir : on y voit une gang de gars qui font passer leur perception des choses comme de la sagesse, s’appropriant l’analyse de la situation et s’obstinant à savoir si le geste était violent ou non, grave ou non, punissable ou non, et si le gars méritait ou non d’être repêché. À travers les discussions, on en voit qui minimisent le geste, prétendant qu’au fond, que ce n’est pas si dramatique, qu’il y a pire (il y a toujours pire). Mais vous êtes qui pour le savoir et prendre la parole là-dessus? Si la fille a de la misère à vivre avec ce qui est arrivé, qu’elle s’est sentie humiliée, utilisée et objectivée, que l’histoire a fait le tour de ses cercles de connaissances et de ses réseaux sociaux et professionnels, qu’elle se fait remettre l’histoire en pleine face tout le temps parce que le gars est repêché par la plus grosse organisation de son sport, qu’elle se fasse accusée de ne pas être irréprochable parce qu’elle était consentante à l’acte sexuel initial et de ne vouloir que salir la réputation du gars... En plus d’avoir eu a subir le geste initial, elle vit et continuera de vivre avec les conséquences de l’action d’une autre personne. Vous pourriez vous garder un peu de gêne quand vous parlez d’une situation qui ne vous touche pas personnellement, et éviter d’y aller de vos jugements de valeur, de votre sarcasme, de votre cynisme, ou de tenter de virer le tout au ridicule. Et commencer votre phrase ou votre texte par « Je n’excuse en rien le geste blablabla », ça n’aide pas. Vous sonnez juste comme quelqu’un qui dit « Je ne suis pas raciste, mais » et qui y va d’un commentaire ou d’un jugement profondément raciste.