Alex Kovalev a connu une très belle carrière. Il a eu l'incroyable de chance de jouer avec des joueurs portant le titre des meilleurs joueurs de tous les temps (Wayne Gretzky, Mario Lemieux, Jaromir Jagr, Mark Messier...). Ce n'est pas rien. Du temps que Kovalev était un Canadien, il se servait parfois de ses expériences auprès d'eux pour trouver des solutions. Il avait la crédibilité pour le faire. Parce qu'il y a une énorme différence entre "avoir joué avec Mario Lemieux" ou "avoir vu jouer Mario Lemieux". Être dans l'action avec lui, voir comment il se prépare, partager sa vision du jeu, ça oblige de le prendre en modèle et vouloir être comme lui. Ça change quelqu'un.
Ma perception de jouer comme on pratique s'applique aussi pour un modèle de personnalité. Par exemple, Mathieu Darche était un bon soldat, vaillant, mais dont la plus grande qualité était qu'il connaissait ses limites. Ayant un talent limité, il a compris qu'il avait l'opportunité de faire son nom en compensant le manque de talent par une bonne éthique de travail. Cela se transpose aussi dans ses qualités de gestionnaire. Un gars pour qui je n'ai aucun doute que ses dossiers seront faits à la perfection, mais ne seront pas non plus clairvoyants. De plus, ayant été impliqué auprès des syndicats des joueurs démontre son allégeance en faveur des joueurs. Je ne le vois pas comme un gars qui aura le courage de trancher dans les dossiers compliqués, mais qui aura toutefois toute la bonne volonté pour remplir les responsabilités que lui confiera Gorton. Ce qui me semble être un problème est que dans l'état dans lequel est le Canadien présentement, on n'a pas vraiment le temps pour quelqu'un qui veut apprendre. Il faudra quelqu'un qui peut sauter dans l'action et assumer ses décisions.
La description serait aussi bonne pour Marc Bergevin. Lui qui a connu une carrière de journeyman et qui avait comme principale tâche d'améliorer l'ambiance dans le vestiaire, rendre tout le monde à l'aise. On a pu voir cela par rapport au fait que pour Bergevin, les intangibles semblaient avoir une importance plus grande que tout le reste, parfois même au prix du talent. Même si je n'ai pas particulièrement apprécié les années de Bergevin à Montréal, il avait quand même certaines qualités. Par contre, comme je tente de le démontrer, il exécutait son travail de gestionnaire à l'image de sa carrière de joueur. Il croyait beaucoup en l'esprit d'équipe, la contribution des joueurs de profondeur et aussi au principe de la seconde chance. Cette philosophie semble être efficace à court terme, mais était plutôt hasardeuse sur du long terme étant donné que les intangibles ne sont pas nécessairement stables.
Pour en revenir à Kovalev qui vouait son admiration pour ses anciens coéquipiers, il y a une différence entre "jouer avec", "avoir vu" et "être". Pour continuer mon plaidoyer en faveur de Roy, il y a une différence entre observer quelqu'un d'exceptionnel et être cette personne. Je veux dire, ce n'est pas qu'une question de statistiques et d'accomplissement en carrière, mais c'est surtout tout ce que ça prend comme motivation intérieure pour réussir tous ces accomplissements, pouvoir les assumer et ne pas baisser les yeux quand vient le temps de défier l'adversaire. Parallèlement, certains ont dit de Price à quel point il était intimidant comme gardien tellement il était bon. C'est la même chose pour Roy. Le fait d'avoir la tête haute, croire en ses moyens, c'est puissant comme symbole organisationnel. L'impact d'un tel personnage est important, car ce qui s'en vient dans les 2-3 prochaines années ne sera pas très beau à Montréal. Il faudra quelqu'un de fier, qui a des contacts, qui connait la game et qui n'a pas totalement le nombril vert pour reprendre le gouvernail de cette équipe. Détester la défaite est certainement un concept à mettre en valeur dans cette équipe.