Voici ce que Hugues a affirmé à The Athletic (en grande partie) :
....le nouveau DG utilise en grande partie la même terminologie que Bergevin a utilisée pendant des années pour expliquer pourquoi il ne peut pas tout raser. « Je ne pense pas que dans ce marché, vous pouvez simplement faire ce que l’Arizona fait et espérer, ou faire ce que Buffalo a fait et espérer », a déclaré Hughes dans une entrevue d’une demi-heure avec Athlétique, dimanche. « On doit remplir cette formation-là. »
Mais Hughes ne promet pas non plus une sorte de solution rapide. « On doit vendre la vision de ce qu’on essaie d’accomplir, comme quoi on va créer un environnement dans lequel c’est agréable de jouer, et qu’au fil du temps on va pratiquer un style de jeu qui est le fun à jouer, a-t-il précisé. Combien de temps faudra-t-il pour y arriver ? Quelqu’un m’a posé une question (sur) les joueurs et le style de jeu. Vous ne pouvez pas avoir un entraîneur qui veut jouer d’une certaine façon si vous n’avez pas les joueurs pour jouer (ce style). Donc ce n’est pas nécessairement un plan d’un an. »
Ce que Hughes et le vice-président exécutif des opérations hockey Jeff Gorton proposent ici semble être une reconstruction qui s’éloigne de ce que le monde du hockey associe d’habitude à une reconstruction." « J’ai rencontré (Brendan) Gallagher hier soir, il est génial, il ne se laisse pas abattre malgré les circonstances, a confié Hughes. On va avoir des conversations. On ne peut pas faire de promesses… à tous les vétérans qui regardent cela et qui se disent “on ne sera bons pendant quelques années, j’aimerais sortir d’ici.” Ce ne sont pas tous les joueurs qui vont sortir d’ici. On doit former une équipe de hockey l’année prochaine, on ne va pas suivre la voie des Coyotes de l’Arizona et échanger tout le monde contre des choix au repêchage. »
Ce qui suit est un portrait de ce qui attend le Canadien lors de quatre moments charnières qu’il traversera au cours des huit prochains mois : la date limite des échanges, le repêchage, l’ouverture du marché des joueurs autonomes et le camp d’entraînement de la saison 2022-23. Nous avons eu l’occasion d’interroger Hughes sur chacun de ces moments de l’année, mais il y a un bémol important à apporter, car Hughes est pour l’instant imbibé dans le moment présent, occupé à préparer la date limite des échanges et à effectuer les premières embauches de son nouveau département d’analyse statistique.
La date limite des échanges
Ce qui est plus compliqué, ce sont les joueurs dont le contrat est encore valide au-delà de cette année, avec Jeff Petry en tête de lice. Hughes n’a pas hésité à dire que s’il pouvait trouver un échange qui convenait à la fois au Tricolore et à Petry, il essaierait de le faire. Mais il ne va pas tout simplement s’en débarrasser.
« J’ai rencontré (Brendan) Gallagher hier soir, il est génial, il ne se laisse pas abattre malgré les circonstances, a confié Hughes. On va avoir des conversations. On ne peut pas faire de promesses… à tous les vétérans qui regardent cela et qui se disent “on ne sera bons pendant quelques années, j’aimerais sortir d’ici.” Ce ne sont pas tous les joueurs qui vont sortir d’ici. On doit former une équipe de hockey l’année prochaine, on ne va pas suivre la voie des Coyotes de l’Arizona et échanger tout le monde contre des choix au repêchage. » En d’autres termes, ce n’est pas une vente de feu. Mais c’est néanmoins une vente. Il y a des joueurs disponibles si des équipes sont intéressées.
« On ne va pas échanger tous les contrats à long terme, tous les joueurs dont le contrat les amènent dans la trentaine. C’est irréaliste à l’heure actuelle, a dit Hughes. Mais si on a la possibilité de bouger des joueurs, on va le faire. Donc idéalement, une grande partie de ce qu’on va faire, ça va être d’acquérir des actifs, que ce soit des espoirs, des jeunes joueurs ou des choix au repêchage. »
Le type d’actifs que préférerait acquérir Hughes prouve la rapidité avec laquelle il aimerait changer les choses. « Je pense que, toutes choses étant égales par ailleurs, si on pouvait obtenir le 13e choix du repêchage de cette année, ou le 13e choix de l’année dernière, ou celui d’il y a deux ans, on prendrait le gars d’il y a deux ans, il est plus proche d’être prêt, a-t-il expliqué. Encore une fois, toutes choses étant égales. Si on n’aime pas cet espoir-là en particulier, on ne le prendra pas juste parce qu’il a deux ans de plus. « Mais c’est clair que ton échéancier se raccourcit quand tu vas chercher des espoirs au lieu de choix au repêchage. »
« Je ne dirais pas que j’ai pensé à (une reconstruction), mais de temps en temps, on en parle, alors pendant une courte seconde, ça te passe par la tête, a dit Gallagher. Pour moi, en tant que joueur de hockey, gagner a toujours été la chose la plus importante. On ne peut pas mettre ça de côté. Cela dit, être un Canadien de Montréal est aussi très important pour moi. C’est donc une question à laquelle je ne peux pas vraiment répondre.
« Vous savez, il y a une différence entre la reconstruction par laquelle des équipes sont passées auparavant — Toronto, il y a quelques années, me vient à l’esprit — où ils ont pratiquement envoyé tout le monde ailleurs et ont recommencé à zéro. Ou bien ça peut être un réoutillage, où une couple de gars sont échangés, mais qui généralement implique une transition un peu plus rapide. Il y a une différence entre les deux. » Encore une fois, il ne semble pas que Hughes et Gorton suivent la voie de Toronto. Mais il serait également erroné de considérer les joueurs sur le point de devenir autonomes comme les seuls qui pourraient partir d’ici le 21 mars. Pour décider des joueurs qui resteront et ceux qui partiront, Hughes dit procéder à un travail de vérification à propos de ses propres joueurs, en parlant aux recruteurs professionnels qui étaient en ville pendant le week-end et qui sont avec l’organisation depuis un certain temps, pour essayer de comprendre pourquoi certains joueurs jouent mal, pourquoi ils prennent de mauvaises décisions.
« On a déjà eu des réunions avec bon nombre d’entre eux. Et on leur fait également comprendre que notre porte est ouverte. Mais jusqu’au jour où on vous appelle pour vous dire que vous êtes échangé, vous faites partie de l’équipe. Et si vous n’êtes pas échangé, vous faites partie de l’équipe. Ce sont des professionnels. »
Le repêchage
La priorité de Hughes dans la refonte de l’équipe sera d’alléger la masse salariale et de ne plus avoir les mains aussi liées par des ententes à long terme avec des joueurs qui n’aident pas l’équipe à gagner présentement. « Je pense que dans le sport d’aujourd’hui, l’argent c’est tout », a mentionné Hughes à cet effet. « Je n’anticipe pas qu’on emprunte le chemin des rachats, particulièrement cet été », a toutefois avisé Hughes. Et dans un cas ou deux, a précisé Hughes, il verrait aussi le Canadien donner plus ou moins un joueur à une autre formation. « Je n’exclurais pas (…) un échange qui n’implique pas qu’on obtienne quoi que ce soit de significatif en retour. En d’autres mots, ils prennent le joueur et le contrat, et nous, on obtient de la flexibilité. »
Bergevin a de plus en plus favorisé la quantité, question d’avoir plus de dards à lancer sur la cible. Hughes, lui, ne voit pas les choses ainsi. « Si c’était juste des dards sur une cible, on ne dépenserait pas autant d’argent pour une équipe de recruteurs, et je pense qu’on devrait en dépenser plus! Il y a un élément d’incertitude dans le repêchage, c’est certain. Mais dans le domaine (de la représentation des joueurs), l’incertitude est bien plus grande. On a recruté des enfants de 14-15 ans, et on n’a jamais eu l’avantage de les interviewer et de décider si on voulait les représenter.
« Alors qu’ici, ils passent des tests psychologiques, ils ont toutes sortes de choses qu’ils appliquent aux joueurs admissibles au repêchage. Alors, non, je crois en la possibilité d’identifier, de cibler et de choisir les bons joueurs. » Mais il faudra que les recruteurs soient convaincants autour de la table. « Si notre personnel croit fermement en quelqu’un sur notre liste, qu’ils l’ont placé bien plus haut qu’il ne se retrouve, alors je cèderais des choix pour obtenir ce joueur-là. » C’est plus tard dans le repêchage qu’il faudra sortir le jeu de dards.
Le marché des joueurs autonomes
« On doit retrouver la fierté de ce qu’est le Canadien de Montréal et de ce qu’il représente », a d’ailleurs mentionné Hughes.
Hughes reconnaît volontiers que certains joueurs ne veulent rien savoir de Montréal, que ce soit pour des raisons fiscales ou encore de climat, ou plus récemment, à cause des mesures sanitaires visant à contrer la COVID-19. Mais à tous les autres, il devra habilement transmettre sa vision de l’avenir pour le Canadien, comme il va continuer à le faire auprès de ses propres troupes dans les prochaines semaines.
« On doit vendre une vision selon laquelle on a les bonnes personnes ici, à commencer par la haute direction, qui comprennent ce que les joueurs veulent, qui comprennent le genre de hockey que la plupart des gens veulent jouer, et comment on crée cet environnement-là dans une ville formidable, a dit Hughes. On peut être créatifs dans la manière de structurer les contrats. J’ai fait ça pendant toute ma carrière, la planification fiscale et toutes sortes d’autres choses pour minimiser ces problèmes-là. Ils sont disponibles de toutes sortes de façons. »
Maintenant qu’il est passé du côté des dirigeants, le marché des joueurs autonomes lui apparaît quand même comme un outil valable pour bâtir une équipe.
Dépenser une fortune pour un joueur de renom? Absolument. Tout dépend de là où est rendue une équipe dans sa courbe de compétitivité.
« Si tu convoites le meilleur joueur disponible, qu’il a 31 ans et qu’il va obtenir un contrat de huit (sic) ans, ce qu’on a vu dans le sport — et certainement dans le hockey — c’est que si tu sens que tu es proche, tu vas t’occuper de l’ici et maintenant, et tu vas sacrifier un peu de l’avenir. Tu vas te soucier plus tard de la fin du contrat parce que tu as besoin de gagner maintenant. »
« Des équipes qui en sont à différents moments, qui ont différents points de pression, vont prendre de bonnes ou de mauvaises décisions. Je n’ai pas peur de faire des erreurs. Donc je ne vais pas réagir en fonction de la pression, et Jeff n’a jamais été ce type de personne-là non plus. On va simplement faire ce qui doit être fait. Et si ça ne convient pas, on ne va pas pourchasser un joueur au-delà des limites du raisonnable, en fonction du contexte dans lequel on se trouve. Et vous n’allez pas le convoiter de la même manière si vous êtes les Panthers de la Floride et que vous avez l’impression d’être à un pas de votre objectif. »
Ces vétérans, Hughes risque de les trouver en attendant quelques jours après l’ouverture du marché, lorsque le prix des joueurs autonomes se sera mis à chuter. Bergevin en a déjà profité lorsqu’il a embauché Tyler Toffoli à l’automne 2020, et Hughes a vécu cette réalité changeante en tant qu’agent.
« Typiquement, il y a d’assez bonnes aubaines à l’autre bout, parce que les choses se produisent très rapidement. Et puis, en l’espace de 48 heures, tout devient très silencieux, croyez-moi. On appelle du monde et ils sont comme, “okay, c’est beau, arrêtez de nous appeler!” »
Le nouvel état-major du Canadien est pleinement conscient qu’il manque de talent de pointe dans son organisation. Mais il y a quand même beaucoup plus de chances qu’il procède à une embauche modeste cet été plutôt qu’à un gros coup d’éclat.
Au camp d’entraînement
Il y a une chose que Hughes a déjà déclarée très clairement, et c’est qu’il aimerait que le Canadien ait un capitaine la saison prochaine. Il a insisté sur le fait qu’il était important d’être réaliste, et donc de se fixer des objectifs réalistes.
« J’espère qu’on va prendre un nouveau départ l’année prochaine, et il y a une certaine excitation-là dedans, mais il va falloir tourner la page. Ce n’est pas comme si on essayait de terminer cette saison-ci pour revenir et essayer de gagner la Coupe Stanley dès l’an prochain, a-t-il avancé. Une partie de notre travail en tant qu’organisation consiste à nous fixer des objectifs, à déterminer ce qu’on essaie de faire, et à créer un environnement. Il s’agit aussi d’enseigner, et pas seulement d’essayer de gagner et de perdre. Comment va-t-on aborder nos journées ? Comment va-t-on améliorer nos joueurs de hockey ? Comment va-t-on améliorer notre équipe ? Ça va être un point central pour nous, et on va le faire dans un environnement où le monde va être heureux d’être là.
« Ce n’est pas plaisant de perdre dans un environnement où l’on est payé pour gagner. Mais lorsqu’on est en mode reconstruction, c’est important qu’on fixe des attentes et des objectifs, et qu’on apporte des perspectives, pour bien façonner l’expérience. C’est important pour nous de le faire. Je suis sûr que l’Arizona, malgré une fiche très semblable à la nôtre, ne se trouve probablement pas dans un environnement aussi difficile en ce moment. »
Hughes et Gorton ont beaucoup à faire d’ici là pour mettre leur empreinte sur cette équipe, mais ce travail — cette reconstruction — commencera véritablement lorsque le Canadien se présentera au camp d’entraînement l’automne prochain.